Réponse au Comité des Usagers du Bassin de Thau du Cycle de l’Eau

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Vue sur la lagune de Thau depuis Sète

Monsieur Loison m’a interpellé, en tant que président du Comité des Usagers du Bassin de Thau du Cycle de l’Eau, à propos de la proposition de révision constitutionnelle que le comité veut faire présenter au Parlement. Cette organisation est née en juin 2016 suite à la mobilisation de nombreux citoyens pour défendre une gestion publique des ressources en eau potable et des eaux usées. Aujourd’hui, face à la décision de plusieurs collectivités (les villes de Sète, Frontignan, la communauté d’agglomération du Bassin de Thau…) de les confier à des sociétés privées, le comité se bat pour faire inscrire par voie de référendum le droit à l’eau dans la Constitution (cliquer ici pour accéder au texte).

Voici ma réponse :

Je soutiens l’objectif de votre collectif de conserver l’accès à l’eau potable et l’assainissement comme relevant du service public. Je pense que la privatisation de leur gestion devrait être obligatoirement soumise à référendum des habitants. Ceci dit il me semble que la Constitution doit se cantonner à poser des principes fondamentaux. Votre texte me paraît plus approprié comme base pour une proposition de loi. La Constitution énonce déjà des principes qui impliquent une gestion publique des biens communs.

Mais aujourd’hui le système qui impose un court terme financier ne donne plus les moyens à l’État et aux collectivités de garantir ces principes. Ce système est incompatible avec le maintien des services publics assurés par l’État et les collectivités. Les élus locaux ne sont pas de simples gestionnaires. Ils représentent la Constitution au plus proche de la population.

Les communes rurales assuraient ainsi la gestion de l’eau grâce à des personnes, souvent bénévoles, avec l’appui technique des services de l’état de la DDE. Ceci allait dans le sens de ce que vous défendez : accès à tous à faible coût avec l’implication de la population dans sa gestion. Les villes d’une certaine taille avaient en général les moyens d’assurer les services techniques d’une régie publique.

Depuis que l’État a abandonné la création monétaire aux banques privées avec une logique d’endettement, nos dirigeants appliquent une politique d’austérité à la population plutôt que de remettre en cause la partie illégitime de la dette publique. Nous avons déjà payé 1400 milliards d’intérêts sur la dette depuis les années 1970.

L’impact est une dégradation financière constante des collectivités, ce qui les empêchent de répondre à leur mission de services publics : baisse des Dotations Générales de Fonctionnement, transferts de compétences de l’État sans la compensation financière équivalente.

S’ajoute la réforme territoriale (loi NOTRE). Elle entérine, de fait, la fin des régies municipales en rendant obligatoire en 2020 le transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux intercommunalités (EPCI). Les énormes entités nées et imposées de la fusion des nombreuses intercommunalités ne correspondent souvent plus aux bassins de vie. La gestion de ces compétences en est bouleversée.

La disette budgétaire de nombreuses intercommunalités les pousse à confier la gestion de l’eau et de l’assainissement à des gestionnaires privés. Suite à cette réorganisation forcée, certains maires estiment que le prix de l’eau sera multiplié par 4. La gestion de ce bien commun s’éloignera de la population.

C’est pourquoi j’estime qu’il faut se battre aux côtés des élus locaux pour un maillage de communes compatible avec l’application des principes édictés par notre Constitution sur tout le territoire. Leur fonction première est bien d’assurer l’accès à ce que Jaurès appelait l’entière croissance : eau, électricité, emploi, santé, éducation, morale …

L’État doit être capable de mettre en place une politique de long terme et cohérente de gestion de l’eau sur l’ensemble du territoire français en s’appuyant sur le rôle des communes. Pour lui donner les moyens d’une planification d’accès à l’eau et à l’assainissement, je me bats pour la mise en place d’un système de crédit public. Avec le contrôle de la monnaie via une banque nationale, l’État créera du crédit spécifiquement orienté vers les projets inscrits dans cette planification. Ainsi doté des capacités d’investissements à long terme suffisantes, l’état et les services municipaux pourront mettre en place un accès à l’eau de qualité et défiant la concurrence des gestionnaires privés de l’eau !

Je serai très heureuse d’échanger davantage avec les membres de votre collectif.

Avec mes salutations respectueuses,

Julie Péréa

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